Fiscalité

SCI : Faire face au rachat de compte courant d’associé

Le 24/04/2018
Le bilan comptable d’une société civile immobilière (SCI) présente parfois une ligne de compte courant d’associé qu’il peut-être opportun, si un associé en demande le rachat et que la société peut y faire face, de refinancer au moyen d’un emprunt bancaire.

Lors de la constitution d’une société, plusieurs associés conviennent par contrat d'affecter des apports à une entreprise commune, en vue de réaliser et de partager des bénéfices, ou de profiter des économies qui en résultent. Ils peuvent effectuer leurs apports de différentes manières.

Distinguer capital et compte courant

S’ils apportent des capitaux ou un bien en capital, les associés reçoivent en échange des parts de la société moyennant le cas échéant des droits d’enregistrement. Ces parts leurs confèrent des droits : droits de vote aux assemblées, un droit aux bénéfices… L’associé est bel et bien propriétaire d’une partie du capital de la société civile.

Si ces apports ne sont pas rémunérés totalement par des parts sociales, ils peuvent être comptabilisés comme « compte courant d’associé». Il s’agit en pratique d’un prêt accordé par l’associé à la société. L’associé est de ce point de vue simplement créancier de la société. Il peut même alors avoir droit à des intérêts si les associés en conviennent.

Le compte courant se créé bien souvent à de la constitution de la société pour assurer le financement des acquisitions immobilières réalisées par la société. Il peut aussi se constituer au fil du temps par exemple lorsque les associés apportent des fonds mensuellement pour faire face aux échéances du prêt bancaire contracté par la société ou même si des bénéfices distribués ne sont pas mis en paiement.

 

Un exemple 

Marie et Pascal constituent une société non soumise à l’impôt sur les sociétés (IS) au capital de 20 000 € en lui apportant 110 000 € chacun. La société emprunte par ailleurs 200 000 € auprès de la banque pour faire l’acquisition d’un bien immobilier productif de revenus et dont les loyers lui permettent de faire face au remboursement de l’emprunt et aux charges courantes de propriété.

 

Bilan simplifié de la première année

tableau1

Les intérêts du compte-courant sont-ils déductibles des revenus fonciers ?

Marie et Pascal déclarent chacun 50% des revenus fonciers au régime réel, déduction faite des charges déductibles (taxe foncière, assurances, intérêts bancaires, charges de propriété…).

Les intérêts versés par la société aux associés en rémunération du compte courant sont déductibles selon les mêmes règles que les intérêts d'emprunt bancaire. La société doit pouvoir justifier que les sommes apportées en compte courant par les associés l’ont été en en vue de générer des revenus fonciers. Ainsi, si les associés ont prévu dans les statuts ou par convention du versement d’une telle rémunération, ils pourront déduire les intérêts versés par la société de leurs revenus fonciers.

 

Des associés imposés à la « flat tax »1 de 30%

En parallèle, les associés  devront déclarer cette rémunération de leurs capitaux. Les intérêts perçus seront soumis au Prélèvement Forfaitaire Unique de 30% (12,8% d’impôt sur le revenu + 17,2% de Prélèvements Sociaux) sauf si leur foyer fiscal opte globalement pour le barème progressif pour l’ensemble de leurs revenus mobiliers.

Et une fois le crédit remboursé ?

Marie et Pascal souhaitent maintenir leur association et conserver le bien mais ils demandent à bénéficier du remboursement des sommes avancées à la société et donc racheter leurs comptes courants2. La société civile peut solliciter un emprunt bancaire remboursé par les loyers du bien et lui permettant de faire face à cette demande de remboursement.
Le banquier étudiera les garanties nécessaires à l’octroi d’un tel financement. Ces garanties prendront la forme d’une nouvelle hypothèque sur le bien, du nantissement d’un élément du patrimoine des associés…

Dans l’hypothèse ou un crédit de 200 000 € est accordé à la SCI pour financer le rachat des comptes courants initiaux, Pascal et Marie pourront recevoir jusqu’à 100 000 € chacun  sans aucune fiscalité puisqu’il s’agit du remboursement d’un prêt qu’ils avaient consentis à la société.

Les intérêts de l’emprunt ayant servi à financer le rachat du compte-courant sont-ils déductibles ?

Un tel emprunt s'analyse en un emprunt substitutif, c'est-à-dire un prêt qui n'ouvre en principe pas droit à déduction des intérêts des revenus fonciers des associés.

Toutefois, pour l'administration fiscale, si le compte courant rémunéré remboursé avait bien financé l'acquisition d'un immeuble appartenant à la société ; alors la souscription d'un emprunt permet la déductibilité des intérêts de cet emprunt. Par contre, si le compte courant n'était pas rémunéré initialement, alors aucun intérêt du prêt substitutif n'est déductible.

Pour le Conseil d'Etat, la totalité des intérêts du prêt substitutif est déductible et ce même lorsque le compte courant initial ayant permis de financer l'acquisition de l'immeuble n'était pas rémunéré.

L’essentiel

L’apport d’un associé à une SCI peut prendre en partie la forme d’un compte courant d’associé

Celui-ci est facilement déterminable si une comptabilité précise a été tenue. Ce n’est hélas pas toujours le cas dans une société civile familiale non soumise à l’IS. Il sera parfois nécessaire de la reconstituer avec l’aide d’un professionnel du chiffre. Cette précaution n’est jamais superflue car en cas de contrôle, l’administration fiscale est en droit de demander les éléments lui permettant de retracer la vie et les flux financiers de la société civile.

L’établissement avec les conseils de la SCI (notaire, comptable ou fiscaliste) d’une convention de compte courant d’associé ou l’aménagement des statuts sur ce point devrait être systématique. Elle permet de sécuriser les relations entre associés, de prévoir le cas échéant une rémunération mais aussi d’encadrer les modalités de remboursement. De telles disposition sont également nécessaires pour sécuriser la valorisation des parts de la société civile pour la détermination du nouvel Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) (notre article IFI du 30 Janvier 2018) loi nouvelle, sur laquelle des incertitudes subsistent dans l’attente de la parution des commentaires officiels de l’administration fiscale.

Ces précautions prises, la société civile pourra solliciter un emprunt pour financer le rachat de compte courant demandé par ses associés qui reprendront ainsi tout ou partie de leurs apports leur permettant par exemple de rééquilibrer leur patrimoine personnel entre actifs immobiliers et financiers.

 

Article rédigé par la Direction de l’Ingénierie Patrimoniale de BPE le 16/04/2018 sous réserve d’évolution de la réglementation