Fiscalité

Cas pratique : déduire ses travaux en 2018

Le 03/04/2018
Dès 2018, des mesures transitoires de déduction des travaux et des charges foncières ordinaires sont entrées en vigueur. Et cela en raison de la mise en place du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux.

L’articulation entre déficit foncier et dispositif transitoire

Dans notre article du 29 mars 2018, nous vous présentions le dispositif transitoire de lissage des travaux non urgents réalisés en 2018 et 2019 sur des immeubles ordinaires loués nus dans la catégorie fiscale des revenus fonciers. Ce dispositif anti-optimisation a été décidé par le législateur pour éviter un report de tels travaux en 2019 susceptibles de déséquilibrer le secteur économique clé du bâtiment.

Toutefois, en cas de réalisation d’importants travaux en 2018, l’application de ce dispositif de lissage couplé aux règles ordinaires de report des déficits fonciers vient nuancer l’effet du dispositif transitoire.

 

Exemple 1 :  Une personne célibataire réalise 10 000 € de travaux en 2018

Prenons l’exemple d’une célibataire dont les revenus fonciers imposables après déduction des charges s’élève à 15 000 €. Elle ne perçoit par ailleurs que des revenus salariaux nets de frais professionnels à hauteur de 60 000 € ne présentant pas de caractère exceptionnel en 2018.
Si elle réalise 10 000 € de travaux déductibles non urgents sur ses propriétés en 2018 et/ou 2019 :

•    les travaux réalisés en 2018 seront déduits de ses revenus fonciers en 2018 mais l’impôt sur le revenu 2018 sera au final neutralisé par le CIMR.
•    seuls 5 000 € seront déductibles des revenus fonciers 2019 compte tenu du dispositif transitoire (cf. article du 29 mars 2018)

tableau 3

Compte tenu de la neutralisation totale de son impôt sur les revenus de 2018 au titre de l’année de transition vers le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, les travaux non urgents réalisés en 2018 auront été déduits d’un revenu exceptionnellement non imposé.
Cependant, sur ces 10 000 € de travaux réalisés, 5 000 € (50%) auront été déduits d’un revenu effectivement imposé en 2019.

 

Exemple 2 : Une personne célibataire réalise 35 700 € de travaux en 2018

Prenons un second exemple identique au précédent mais notre contribuable réalise  davantage de travaux en 2018.

Le déficit foncier causé par les travaux est déductible de son revenu global 2018 dans la limite de 10 700 € et l’excédent (10 000 €) est reporté.

En 2019, son revenu foncier reste négatif de 2 850 € en raison de la prise en compte de 50% des travaux de 2018.

En 2020, son déficit en report de 10 000 € peut être imputé sur ses revenus fonciers redevenus positifs.

tableau4

Au final, sur les 35 000 € de travaux réalisés 27 850 € (soit 80%) auront été déduits d’un revenu effectivement imposé (17 850 € en 2019 + 10 000 € en 2020).


À retenir

Ces exemples illustrent que la réalisation de travaux significatifs en 2018 générant un déficit reportable peut venir améliorer le taux d’imputation des travaux sur des revenus effectivement imposés. Ici de 50% à 80%.
En l’état  actuel des textes en vigueur, et au-delà d’un niveau de travaux excédant 2 fois les revenus fonciers + 10 700 €, le taux d’imputation des travaux sur des revenus effectivement imposés devrait même en théorie dépasser les 100% si aucune limitation n’est apportée sur ce point à l’avenir par le législateur.
La décision de réaliser des travaux significatifs devra avant tout être prise par l’investisseur en fonction de son optique de valorisation de son patrimoine immobilier existant ou à acquérir et en considération de sa capacité d’engagement.
Il lui sera également nécessaire de réaliser une analyse fine de ses éventuels stocks de déficits fonciers préexistants et de la capacité des revenus fonciers espérés dans les 10 prochaines années à absorber effectivement le report des déficits.

Le cas particulier des Monuments Historiques


Certains travaux effectués sur des immeubles éligibles au dispositif des Monuments Historiques peuvent être imputés sans limite de montant sur le revenu imposable.
La réalisation de tels travaux en 2018 sera soumise aux mêmes règles que les travaux sur des immeubles classiques, mais les conséquences du dispositif transitoire seront d’autant plus significatives pour les contribuables concernés que l’imputation de déficits issus de travaux réalisés sur ces immeubles n’est pas limitée.
Le déficit issu de tels travaux s’il est uniquement déduit de revenus ordinaires n’aura aucun impact fiscal en 2018, car l’impôt sur ces revenus ordinaires a vocation  à être neutralisé par le CIMR.
Toutefois, si les revenus de l’année  2018 sont en partie qualifiés d’exceptionnels pour le calcul du CIMR, la déduction du déficit aura bien un impact sur le montant de l’impôt à payer par le foyer fiscal. L’impact restera toutefois relativement atténué par rapport à une année habituelle.
Dans tous les cas et à l’instar des travaux réalisés sur un immeuble classique, le montant des travaux réalisé en 2018 entrera dans la moyenne calculée en 2019 pour la détermination des travaux déductibles cette année-là, au même titre que les travaux qui seront réalisés sur le même immeuble en 2019.
Le législateur a toutefois prévu que, par exception, les travaux éligibles réalisés en 2019 sur nouveaux projets c’est à dire sur les monuments historiques acquis, classés, inscrits, ou ayant reçu le label en 2019 pourront être déduits à 100 % du revenu global imposable en 2019.

 

Article rédigé le 29/03/2018 par la direction de l’ingénierie patrimoniale de BPE